[Oncle Barney]

On en parle de plus en plus dans notre société, où tout est en temps réel, où la masse d'informations qui nous arrive chaque seconde est gigantesque et sans filtre, où la nécessité de la réussite nous semble une évidence alors qu'elle n'est que le produit de cette société 2.0.
Il en résulte une infinité de possibilités s'offrant à nous, avec un temps qui, lui, est fini. Il faut donc faire un maximum de choses dans un minimum de temps. Voilà l'injonction à nos inconscients.

La conséquence est qu'on ne laisse plus le temps aux choses de se passer, alors que ce temps est souvent primordial. Il l'est AVANT de faire les choses pour réfléchir à ce qu'on veut faire et comment on va s'y prendre. Il l'est PENDANT à cause de processus qui prennent inconditionnellement du temps (ex: les sentiments). Il l'est APRES afin de réfléchir à ce qu'il vient de se passer et en tirer les enseignements.

Prenons un exemple (celui qui m'a fait écrire ce texte): les sites de rencontre.
Je lis en grande majorité ici des choses telles que "ça me prend trop de temps" ou "ça me bouffe trop d'énergie" et ce "pour aucun résultat". Conclusion unanime: "c'est pourri leur truc".
Moi j'aurais envie de poser ces questions:
* Avez vous préalablement réfléchi au principe du site en question et à son fonctionnement? Etes vous certain que ce site peut vous apporter ce que vous rechercher? Et avez vous pris le temps de préparer un minimum votre "stratégie"?
* Avez vous pris assez de temps pour utiliser le site? Avez vous tester sur une durée significative? Avez vous laisser le temps des interactions? Avez vous fait varier votre stratégie pour voir si cela avait un effet?
* Avez vous pris du recul vis à vis de votre expérience? Avez vous cherché les causes possibles de cet échec, et quels étaient les enseignements de cette expérience?

Tout ceci relève du bon sens n'est ce pas?

Si vous n'avez pas fait ça, c'est parce que vous attendez que ce site vous apporte sans trop d'effort et d'investissement ce que vous recherchez. Il est donc normal qu'il soit l'unique responsable de votre échec.
Après tout, comme n'importe quel outil, quand on se tape le doigt avec un marteau, c'est bel et bien la faute du marteau n'est ce pas? Ou si vous désirez vissez quelque chose, ce sera évidemment la faute du marteau si la vis ne rentre pas comme vous voulez

Derrière tout ça, il y a la frustration.
Frustration parce qu'on fantasme les choses au lieu de les voir telles qu'elles sont
Frustration parce qu'on ne réfléchit pas vraiment à comment accéder aux choses
Frustration parce qu'on répète encore et encore les mêmes schémas

Le temps, bien utilisé en se posant les bonnes questions, nous permet d'échapper à la frustration. Alors que l'absence de temps, soit l'immédiateté, le raccourci, la facilité, l'illusion, et donc le manque de conscience nous y mène à toute vitesse. Et au bout, il y a inévitablement un mur.

Et vous, pensez vous que vous prenez le temps pour chaque chose que vous entreprenez? Vous posez vous les bonnes questions, celles du bon sens?
Demandez vous où vous pourriez en prendre et qui pourrait réellement faire une différence.

[Shyn]

Un bon gros +1 mon poulet.

Quand je vois des "pas de match en 4 jours, Tinder c'est de la merde !", ça me hérisse le poil.
On retrouve ça aussi sur le plan sportif, "je veux me mettre a la muscu, mais combien de temps avant d'avoir le corps de [machin]".

Cette volonté de rentabiliser, voir le "temps" comme un investissement est la source numéro 1 de votre frustration.

[AutelDuLustre]

La limite de temps est quand même une réalité.
Disons que si j'ai un temps X, je priorise son utilisation tout en gardant une certaine variété.

Je pense que ce qui se joue tient à la perception du temps. Le voit-on comme un allié ou comme un flot contraire ?

Pour le voir comme un allié, la méditation et toute autre méthode d'ancrage dans le présent est ce qui ressort de tout ce que j'ai lu.
Cependant, on a tous des objectifs et donc la projection vers le futur est inévitable. Une astuce est alors de décomposer le grand objectifs en petits objectifs pour rapprocher la réalisation du présent (future proche voire très proche). Et on se dit tout de suite (ou le soi-même) : "aujourd'hui, j'ai fiat ça, ça m'a apporté ça".

Ainsi, on se dit "ce que je fais aujourd'hui me fait grandir". On profite du moment aussi bien en terme de réalisation orientée ver le futur que de sensation (vu que l'on couple cela à la méditation).

J'ai beaucoup réfléchi à cette notion d'instantanéité que je déplore, étant parfois nostalgique du bon temps avec le téléphone fixe et la lettre. Il suffit de voir les vieux films, le rythme est beaucoup plus lent, beaucoup plus cool.

La pression de l'instantanéité se fonde sur :

- les progrès en matière de télécommunication qui est disponible 24h/24 et partout (mobiles et internet)
- la comparaison sociale (réseaux sociaux)
- la culture américaine

Je pense aussi que beaucoup de gens veulent trop faire de choses et ne font donc plus rien (c'est mon cas).

Dans mon cas, je suis une nature très stressée voire hyperactive. J'ai envie de toujours faire un truc pour réussir.
Mais maintenant, je lie toujours ce que je fais au présent avec l'objectif final. Je médite aussi. J'évalue le temps que j'ai et donc je ne me lance pas dans trop de trucs.

Je m'autorise aussi à lâcher prise.

[Welgo]

Vis et marteau ? C'est possible ça ?
Sinon je suis d'accord, c'est du bon sens. Se poser et prendre du recul est nécessaire.
Bref, a vous les studios

[Oncle Barney]

Envoyé par Welgo

Vis et marteau ? C'est possible ça ?

Ajout du smiley pour signifier le 2nd degré

[Milady]

Je souscris à tout ce qui a été dit... Le fait d'avoir "gagné du temps" grâce à internet, au mail, nous aliène, vu que comme nous sommes censés en avoir plus, on nous demande d'être plus "efficaces", c'est-à-dire d'augmenter notre productivité, d'être immédiatement réactifs... Insidieusement, le temps dévolu au travail (un tiers du temps) grignote le temps de loisir et de sommeil.

Mais cette accélération des échanges, ce déluge d'informations n'a pas seulement pour effet de surcharger de travail ceux qui en ont déjà, elle se répercute aussi sur les échanges sociaux et nuit à la communication. Il m'est arrivé, par exemple, de croiser plusieurs fois un collègue dans un couloir, jusqu'au moment où il me saute dessus, énervé, parce que je n'ai pas répondu à son mail. N'aurait-il pas pu me dire ce qu'il souhaitait, à la première rencontre dans un couloir ? Bref, on commet l'erreur de confondre "informer" et communiquer, tisser des relations humaines... De même, comme on a moins de temps, on veut des résultats immédiats, on oublie ce qu'est la patience, l'attente ; on vise la satisfaction immédiate (c'est très consumériste d'ailleurs).

Avec les relations amoureuses/sexuelles, internet induit à la consommation de l'autre. On veut de l'immédiat, une rentabilité maximale pour un "investissement" minimal. J'ai vu, sur certains sites, des types poster des petites annonces et revenir se plaindre qu'il n'y avait que des "fantasmeuses" sur le site, parce qu'ils n'avaient pas reçu de réponses. Quand on leur suggérait de venir discuter sur le forum, pour se faire connaître, donner envie aux utilisatrices de faire connaissance et leur laisser le temps d'être séduites, ils répondaient aigrement qu'ils n'avaient "pas de temps à perdre à palabrer". Comment peuvent-ils faire envie s'ils ne montrent d'eux qu'une demande et tiennent la sociabilité pour quelque chose d'inutile ? Je suis persuadée que pour séduire, il faut prendre le temps, qu'il s'agisse de charmer activement une cible, ou qu'il s'agisse de s'exposer, de se montrer suffisamment pour devenir la cible de quelqu'un, homme ou femme.

Personnellement, j'ai toujours été séduite par des gens qui prenaient le temps, saisissant les petits signes que l'on m'envoyait quand la personne me plaisait. Et parmi les hommes qui prennent le temps que je connais, certains seraient de piètres "gamers" : pour cause, ils n'ont jamais eu à "draguer" ; la dame était suffisamment séduite pour que tout coule de source, naturellement. J'ai même un charmant ami qui n'a quasiment jamais eu à faire le premier pas (ou le dernier, je ne sais pas) : simplement il se montrait, il était lui-même, avec son humour, son goût de l'échange, ses qualités, sa sensualité... et les femmes étaient attirées comme des papillons de nuit par un réverbère.

Le problème avec l'immédiateté, la rapidité d'un site comme Tinder, c'est que le physique va forcément devenir le seul critère : on a le choix entre tout un tas d'images, on choisit la plus "belle", celle qui correspond le mieux aux modèles et aux icônes de beauté dont nous abreuvent la pub, la mode et Hollywood. On est dans la consommation immédiate... Mais le problème est celui de tous les sites de rencontre : on a l'impression que "tout est possible" et qu'on peut choisir sur catalogue, qu'internet met tout (même l'Autre) à notre disposition : comme on se retrouve d'un clic au contact d'inconnus, on a tendance à avoir des attentes démesurées, même sans s'en rendre compte : on espère que le hasard nous mettra au contact d'un personnage "parfait" correspondant à nos fantasmes. On se retrouve incapables de rêver à partir de l'être qu'on a en face, parce qu'on a commencé à mettre la barre trop haut (ou plutôt que "haut", je devrais dire "à un niveau fictif"). Les femmes ont l'impression de ne tomber que sur des types sans intérêt (il y en a en effet, mais quand on s'est préparée à rencontrer Christian Grey, ça n'aide pas à trouver Mathieu ou Arthur séduisants) et les hommes sont agacés de tomber sur des filles quelconques qui jouent les princesses dégoûtées.

[Niico]

Jeune de cette génération Y, c'est une lutte constante contre cette philosophie qui nous a été imposé comme modèle :
Combien de fois je me rend compte que je ne fonctionne que par "passion" et que ces passions sont aussi éphémère que j'ai pu les satisfaire rapidement!
Parfois je me suis écoeuré moi même !

Les choses que j'ai mis du temps a construire, qui m'ont demandé un investissement, et sur lesquelles je passais, parfois à reculons, du temps, elles, ont toujours était beaucoup plus valorisante et permettent de construire quelque chose de concrêt.

Exemple tout con : la peinture sur maquette, un hobby qui m'a duré une décennie.
Dans un premier temps, je peignait rapidement, bâclant et misant sur la quantité. Puis, avec une certaine maturité et un recul, je devins moins excessif, accordant plus de temps à chaque pièce. Et je finis par etre fier de mon travail!

Dans mes relations: même constat. Qu'elles soient amoureuse ou amicale, ou encore familiale...

Je cherche encore parfois des raisons valable pour :
acheter cette connerie
passer ce temps la a l'ordi pour le rentabiliser...

Cette trop grande opportunité et choix de possibilité bride aussi d'elle même : on fini par stagner de peur de faire des choix! Des choix qui finissent alors par s'imposer! Et frustrer plus encore :
Mon dernier exemple : vous etes en couple avec une fille. Elle vous plait globalement ensemble vous êtes bien. Mais vous ne vous engagez pas, parce que qui dit que dans l'avenir, vous ne trouverez pas mieux?
Cas de conscience, tout devient consommable. Trop de divorces : normal, dès qu'un problème se présente, les couples de déchirent, n'ont plus la résilience que pouvait avoir d'autres couple qui prenait le temps... à l'époque. Et oui c'est bel et bien factuel!
On nous a appris a tout consommer; meme les sentiments!
"Elle vient de vous quitter? c'est pas grave, avec tinder, 1 de perdue, 10 de retrouvées!"

Je me demande si je vais pas supprimer la dernière application de "rencontre" qui me restait, parce que sur celle là j'ai fait une belle rencontre. mais moins valorisante que la femme avec qui j'ai Rendez-vous ce soir rencontré sur un opening osé!

Bonne soirée.

Edit : j'ai aussi envie d'ajouter ; dans l'immédiateté, on l'attend pour tout : combien de gens viennent sur le Forum, exiger des réponses qu'ils devraient trouver en eux, ou raler lorsque leur réalité est remise en question par une remarque... Et ça vaut pour moi aussi!

[aigle]

J'ai bien apprécié ces petits textes et court récital de philo, ce fut très intéressant.

En effet, je craints fort que plusieurs, dont moi, recherche souvent la rapidité. Un peu comme avoir une belle maison clé en main sans jamais avoir levé le petit doigts. Je me rends compte maintenant que c'est dans le temps investit en quelque chose qui apportes de la valeur à ce même quelque chose. J'ai été berné bien souvent, je recherchais de la rapidité, des réponses miracles parfois même. Toute chose de valeur doit prendre du temps pour se construire et se raffiner.

[Shadiboo]

Je dois avouer que j'ai aussi cette culture de l'immédiateté depuis tout petit et je ne sais pas trop d'où ça vient.

Que ça soit au travail, au sport, dans un jeu ou en séduction je veux du résultat et rapidement. Après j'essaye de mettre les moyens pour mais le manque de patience est un véritable souci.

Un pote m'a déjà dit que ce n'était pas une fatalité, vous pensez qu'on peux changer un aspect de sa personnalité comme ça?

Quels seraient les avantages de prendre son temps à part ralentir un processus qui peux être réalisé plus vite?

[Oncle Barney]

Ca n'est pas un trait de personnalité!

Pour comprendre ce qu'il se passe en toi, n'agis plus impulsivement et confronte toi à cette inaction, de la même manière que je l'ai indiqué dans ton sujet