Nous avons tous traversé des moments de doute, des moments de douleur, des moments d'effondrement ou, à l'inverse, d'anesthésie émotionnelle face à un choc. Nous avons tous, à un moment donné, levé le bouclier dans l'espoir de nous en protéger et d'affronter le monde sans plus nous blesser.
Je me suis interrogée sur ce phénomène, sur ma façon personnelle de faire face à ce genre de situation, et je me suis demandée dans quelle mesure cette réflexion pouvait s'étendre aux autres femmes (et peut-être aux hommes, qui sait ?). La question posée est donc : qu'est-ce que le courage au féminin ?
N'y voyez pas de sexisme de ma part, simplement une prise de position du simple fait que je sois membre de la gente féminine.
"Je ne veux plus souffrir"
Le premier réflexe, lorsque l'on est blessé, c'est de vouloir s'en protéger. La levée de bouclier peut prendre plusieurs formes :
- agressivité
- passivité / indifférence
- repli
- autoritarisme
- ...
Toutes reposent sur un postulat qui est le suivant : "je ne veux plus souffrir". On se pose des garde-fous, on s'impose des restrictions, on se refuse certaines choses, certains choix, pour ne pas réitérer l'expérience qui nous a blessée.
Cependant, peut-on réellement ne plus souffrir ? Est-ce véritablement souhaitable ?
Réfléchissons un instant à deux points importants :
1. Si l'on ne souffre pas, c'est que l'on ne ressent pas
La douleur est provoquée parce que l'on est impliqué, parce que l'on est lié à la cause de cette douleur. Cela veut dire que l'on s'y intéresse, que cela compte. Que cette personne / chose / situation a de la valeur à nos yeux.
Ne plus vouloir souffrir, c'est donc refuser de donner de la valeur à ce (et ceux) qui nous entourent. C'est se construire un monde de solitude dans lequel plus rien n'a d'intérêt. Ce n'est pas vivre.
2. Si l'on ne souffre pas, on ne guérit pas
La guérison est un phénomène qui procure plusieurs belles choses, notamment un sentiment de bien être, une étape d'évolution, une nouvelle occasion de lier des liens ou de les renforcer...
Encore faut-il l'accepter ! Mais si l'on ne souffre pas, on ne guérit pas, et l'on se refuse donc cette phase ascendante extrêmement importante dans la vie d'un être humain.
C'est ce qui constitue l'expérience.
Tout être vivant évolue, refuser de faire face à cette évolution et donc à ses possibilités de chutes et de rebonds, de souffrance et de guérison, c'est nier son droit à l'évolution.
Ma conclusion est donc simple : nous devons accepter de souffrir. Il n'existe pas de parcours sans souffrance, et vouloir refuser la souffrance n'est pas une force ni une forme de courage, mais une forme d'aveuglement qui empêche d'évoluer.
La vulnérabilité est une force
Dès lors que l'on accepte le fait qu'on ne peut pas ne pas souffrir, on comprend qu'il est vain de vouloir s'en cacher à tout prix.
L'attitude inverse, cependant, est tout aussi néfaste : il ne s'agit pas de foncer en ligne droite en ignorant le danger, mais plutôt d'accepter la prise de risque.
Il ne s'agit pas de faire tout et n'importe quoi, mais de ne pas s'interdire d'agir par peur de souffrir.
La clé, ici, ce n'est pas uniquement l'acceptation de la souffrance, mais aussi la conscience de sa propre capacité à rebondir.
Nous progressons, grandissons, évoluons parce que nous chutons et nous relevons.
Notre force réside dans notre capacité à nous relever.
Cette force doit nous pousser à préférer l'action afin de ne pas constituer de regret.
Le regret est plus douloureux et bien plus emploisonnant que la douleur de la chute et la satisfaction de s'en relever.
D'autant plus que
le regret est une blessure qu'on ne ressent qu'après et qui ne guérit jamais.
(Je parle ici dans le cadre d'une relation sentimentale, mais c'est valable à mes yeux dans toutes les situations de la vie)
Citation:
"Je sais que tu peux me faire souffrir, tu peux me faire (ou tu m'as fait) mal, très mal, mais je l'accepte, parce que je sais aussi que je peux me relever"
|
En acceptant de prendre le risque de souffrir, on prend également le risque (ou la chance, plutôt) de réussir, de guérir.
Citation:
"Tu peux me faire souffrir, mais ce n'est pas grave parce que je m'en relèverai. Mais tu peux aussi me rendre heureuse, et m'aider à guérir lorsque je me blesse."
|
Il n'existe pas de vie sans souffrance.
Il n'existe donc pas d'expérience de couple sans souffrance. Cependant, il n'existe pas de couple durable sans guérison.
Accepter de souffrir, c'est accepter d'être également guérit. Et la beauté de la chose, c'est que la même personne possède ces deux pouvoirs.
Vulnérabilité et indépendance
L'acceptation de la vulnérabilité et du pouvoir destructeur/guériseur de l'autre n'est cependant pas le renoncement à son indépendance.
L'autre
peut me guérir, si j'accepte de le laisser m'aider. Mais j'ai le pouvoir de me relever même sans cela.
En fait, la beauté de la guérison n'est pas seulement dans le don, elle est aussi dans l'art de la recevoir.
Citation:
"Je t'autorise à me guérir, je te laisse voir ma vulnérabilité parce que je suis assez forte pour m'en relever même sans toi, et nous créons ainsi un lien durable et fort entre nous."
|
L'idée n'est pas non plus de révéler
toutes ses vulnérabilités.
L'acceptation de la guérison est un choix, qui découle naturellement de la confiance et de la complicité établie entre les deux personnes, et de la confiance de chacun en sa propre capacité de guérison, mais qui n'a aucun lien avec la dépendance / l'indépendance de chacun des deux.
Le partage de cette vulnérabilité est une force pour le couple, mais ne doit pas constituer un affaiblissement pour celui qui se dévoile. C'est une main tendue, à laquelle la réponse (la guérison) apporte du bonheur/plaisir et renforce le lien.
Ceci n'est qu'une ébauche de réflexion, je ne prétends pas qu'elle soit universelle ni objective, mais j'espère qu'elle vous aura apporté quelque chose.
Merci de m'avoir lue