[AlexandreDeMacedoine]

Bonjour,

Je me faisais quelques réflexions dernièrement sorties un peu de "nulle part" (sans doute de liens obvscurs entre différentes connaissances, je ne saurais dire lesquels donc je ne vais pas chercher à donner de références scientifiques ici) qui m'ont conduit à mettre de la forme autour de ce que "être soi" voulait dire et impliquait.

Comprenons-le, "sois toi-même" est un conseil galvaudé, souvent mal compris (ce qui conduit souvent à une accusation portée vers l'extérieur du genre l"es femmes racontent du bullshit sur ce qu'elles aiment", etc.) faute de mieux. Pourtant, on gagne souvent - au lieu de passer tout de suite à l'application concrète parfois hasardeuse - à se demander ce que l'on nous conseille vraiment.

Et pour cela, je vous propose de décortiquer la proposition "Etre soi" en prenant les mots séparément puis ensemble.
La grande difficulté en réalité vient du fait que ces termes ont des sens tellement larges et sont tellement "axiomatiques" qu'ils en deviennent difficiles paradoxalement (comme d'autres mots comme "gentil", "bien", etc.).

Commençons par le verbe "être". Que signifie-t-il vraiment ? On se le représente bien mais l'expliquer est plus délicat. Passons donc à son application concrète.
Le verbe "être" pourrait, si l'on cherchait des similitudes un peu originales, s'apparenter à au signe d'inclusion (égalité ou inclusion d'ensemble) dans la sphère mathématique en rajoutant deux éléments importants : le temps, le référentiel et/ou domaine d'application.
Le temps bien sûr car "être" se rapporte à un point dans le temps et non à un vecteur. On "est" ou on "a été". Le référentiel bien sûr car chaque élément peut avoir des réalités différentes selon son référentiel, notamment "Je".
Quoi qu'il en soit : être soi, par la présence du verbe être suppose une multiplicité potentielle d'une part et un processus au présent.
Notons le à part pour plus tard, le mot "Etre" est aussi associé à la "Vie".

Je passe immédiatement à la combinaison en faisant un petit détour par le "Je" ("Soi").
Comme je l'ai dit, le verbe "être" est semblable à l'inclusion d'ensemble. En ce sens, la phrase "Je suis moi-même" pourrais se représenter par "Je" inclus-ou-égal "Moi-même".
Nous voyons dans cette proposition donc une dissociation du "Je" en deux entités qui confirme bien (car le langage, quand il est choisi, n'est jamais innocent) la pluralité induite par le verbe être.
De fait, je distinguerai bien deux voire trois "Je" avec une métaphore sur la propriété (je ne parle pas ici de Loi, ce n'est pas le propos et je ne connais même pas le cadre légal).

Nous avons en premier lieu le "Je" interne, il s'agit de ce qui ne sort pas de nous et ce qui est immatériel (nos pensées, nos rêves, etc.). Ce "Je" nous appartient, c'est notre propriété.
Ensuite, nous avons le "Je" extérieur strict (notre corps exclu). Ce "Je" ne nous appartient pas : il s'agit de notre image. Il y a notre image publique et notre image "privée", au sens qui nous sommes dans la tête des gens. Bien sûr on peut influer dessus tout comme l'extérieur peut agir sur notre "Je" à nous mais on n'en est pas propriétaire vu que nous ne sommes pas l'instance qui le jugeons.
Enfin, il y a le "Je" physique, le corps qui est une sorte de frontière, un tampon.

Vous comprenez donc bien qu'il existe nécessairement une disjonction interne au "Je" globalisant. Le "Je" est non seulement multiple mais aussi partiellement maîtrisable.

Mais alors qu'est-ce que "toi-même". Là encore, ce mot n'est pas un synonyme strict de "Je" puisque la connotation propre à ce terme est "Je" - "Je"inter"Environnement" = la partie interne de "Moi" = MON "Je".

Conclusion : Etre soi-même induit comme conseil qu'il faut tendre à se limiter à vivre (car est est associé par connotation à la vie) notre "Je" interne.

Mais comme le "Je" inclus ce "Je" interne et comme "Etre" désigne une situation nécessaire et irrévocable, nous sommes déjà, dans le référentiel interne le "Je" interne.

Alors pourquoi ce conseil ?

Tout simplement car nous dépensons beaucoup d'énergie à essayer de contrôler le "Je" externe qui n'est pas notre propriété et que nous pouvons au mieux influencer sans garantie de résultat. Je ne dis pas que c'est mauvais mais justement le véritable but et problème rencontré par les gens recevant ce conseil c'est d'aligner ce qu'ils projettent SUR ce qu'ils sont à l'intérieur (et pas inversement).
Et c'est là que le vecteur agit. Le problème qui se pose est quand nous partons d'un postulat sur le "Je" externe, l'intégrons pour le modifier. C'est ce qu'on appelle en électricité un court-circuit.

Bref : Plutôt que de rejeter le conseil "sois toi-même", essayons de le vivre dans le bon sens.
Car "sois toi-même" (conseil très précis au fond) induit qu'il faut faire attention à ne pas se laisser déborder par la sphère publique (ou privée DES AUTRES) et d'au contraire faire du "Je" interne sa source. Ainsi, on comprend qu'"être soi" n'est pas "se laisser porter", le "Etre" a valeur performative" et induit un effort.
C'est donc très compliqué.

Petite parenthèse : c'est aussi le fameux problème du conseil "sois gentil, attentionné", c'est qu'il est mal compris.
Alors comme on est un peu lâche par nature (normal), on va dire que "les femmes racontent du bullshit" au lieu de comprends. Un "mec gentil" ne signifie pas que le mec sois dans une démarche d'appropriation d'un modèle externe au détriment de soi et encore moins que le mec se limite à ce terme.
Il y a bien sûr d'autres choses qui entrent en jeu et qui démonteraient les attaques du genre mais c'est un autre sujet.

[Awaken]

Wow, tu t'es bien pris la tête pour décortiquer tout ça . Ca ressemble au discours d'un mec qui vient de se rouler un ****, no ?

Sinon, sujet très intéressant, je m'y intéresse de près en ce moment, mais pas tellement sous angle sémantique, mais plutôt "substantiel" si je puis dire.
C'est à dire, que représente ce "moi" ou ce "je".... et je te reviens sur une partie de ton analyse comme quoi il peut être une projection externe de soi-même (du vrai moi). Et c'est du très lourd, quand on s'y penche de près, on comprend un conditionnement qui baise totalement nos rapports à nous-même et aux autres depuis notre tendre enfance.
"Soi toi-même", à condition d'avoir pris conscience de son identification à la perception que l'on a de nous-même (personnalité, dont l'étymologie vient du latin "persona", mot grec qui signifie "masque" au passage), on continue malheureusement à s'identifier à son égo...

[tron]

C'est assez intéressant comme manière de voir les choses. C'est assez complexe à digérer mais intéressant.
Être soi-même est un exercice complexe qui demande sans cesse introspection et adaptation, loin des discours hippies d'harmonie naturelle et spontanée c'est assez difficile.

[AlexandreDeMacedoine]

D'un point de vue pratique en effet être soi est difficile pour plusieurs raisons :

- le monde extérieur n'est pas regi par les mêmes règles que notre monde intérieur (or le moi interne est aussi composé par notre rapport au monde ; exemple basique : si je m'imagine un dialogue dans ma tête, JE contrôle les réactions de mon interlocuteur fictif)

- de nombreux filtres (peurs, projection pour reprendre un topic récent de trin, etc.) peuvent rendre l'exeriorisation tres dure (d'où l'invalidité de proverbes du genre "fie toi aux actes et non aux paroles") ; d'où le travail d'affirmation de soi

En réalité il y a encore plus compliqué : quand on n'arrive même plus à se connecter au moi intérieur. Est-il vraiment une succession de photos ? Je ne pense pas.

Quoi sûil en soit ce sujet m'intéresse depuis longtemps simplement car il me fait et m'a fait énormément souffrir. Je pars en vacances mais j'avais une petite fournée en tête sur le sujet.

PS : non Je n'étais pas drogué, je pense de cette façon en général...quand je pense. ^^ Ca me vient à retardement quand j'ai pas mal pensé à un sujet (de manière stérile en générale sur le moment)

[Gesualdo]

J'aime pas trop "Sois toi-même", je trouve ça passif....
Je pense que le problème est comme tu l'as dis dans le verbe ETRE
c'est un peu passif, genre "sois-toi même" même si t'es une merde (à l'interieur ou à l'exterieur mdr).
comme tu l'as dit c'est un peu le serpent qui se mord la queue

Exemple :
1/ Mon je interne/externe est une merde
2/ Mais un jour je lis ce beau proverbe : "Je suis moi même"
3/ Résultat Je suis (toujours) une merde


Je préfère "Deviens ce que tu es" (Nietszche).
Ca sous-entend que notre essence (=ce que nous sommes) a été recouverte par de la poussière. Cette poussière, qui nous sépare de ce que nous sommes, c'est l'éducation de nos parents, les impératifs de la société, brefs toutes les idées fausses avec lesquelles on nous a bourré le crâne :
"Le sexe c'est dégueulasse"
"Il faut être gentil"
"Il faut être poli"
Autrement dit nous ne sommes pas actuellement ! C'est le projet !

"Deviens ce que tu es" signifie enlever toute cette poussière qui nous sépare de ce que nous sommes

1/ Je ne suis pas
2/ Mais un jour je lit cette phrase "Deviens ce que tu es"
3/ Je suis

Pas besoin d'ajouter quelque chose après le verbe "être" qui est aussi intransitif

En plus selon Nietzsche, si tu fais bien ton boulot ("Devenir ce que tu es")
tu deviens un Lion
Et si tu te gaves
tu deviens un Enfant (Bah oui quand on nait il n'y a pas de poussière !)

[tron]

Envoyé par AlexandreDeMacedoine

D'un point de vue pratique en effet être soi est difficile pour plusieurs raisons :

- le monde extérieur n'est pas regi par les mêmes règles que notre monde intérieur (or le moi interne est aussi composé par notre rapport au monde ; exemple basique : si je m'imagine un dialogue dans ma tête, JE contrôle les réactions de mon interlocuteur fictif)

- de nombreux filtres (peurs, projection pour reprendre un topic récent de trin, etc.) peuvent rendre l'exeriorisation tres dure (d'où l'invalidité de proverbes du genre "fie toi aux actes et non aux paroles") ; d'où le travail d'affirmation de soi

En réalité il y a encore plus compliqué : quand on n'arrive même plus à se connecter au moi intérieur.

J'aurais pas dit mieux.

Envoyé par Gesualdo

1/ Mon je interne/externe est une merde

Je comprends ce que tu veux dire, tu dis la même chose qu'alex en fait en changeant un peu de paradigme mais par contre le moi interne n'est jamais une merde. Certaines personnes se sentent indignes mais ça ne signifie pas qu'ils sont nuls. Nos désirs profonds ont parfois du mal à se concrétiser dans la réalité, il faut apprendre à la dompter, l'explorer, ça ne fait pas de nous des gens nuls.
Ca enlève rien à la validité de ce que tu dis. Je suis d'accord que "deviens toi-même" est mieux que "sois toi-même", ça se travaille dans le temps.