[Helmut]

Bonsoir,


Ayant été absent du forum pendant près de deux mois, cette absence s'explique par un retrait quasi-total d'internet et des relations humaines en général, entrepris en raison d'une grande introspection et d'une grande remise en question de moi-même. J'estime avoir plus su de moi-même que ne le ferait d'autres hommes pendant toute une vie; mais la connaissance étant loin derrière, les réponses ayant surgi en profusion après maintes réflexions, n'importe plus que que la décision, que la transformation, que la changement, que le renouvellement et le renouveau - commence ma réforme.

Si je suis ici, il est à soupçonner que ces réponses et ces observations ne me remplissent pas de joie, mais j'assure ne pas venir uniquement (cette restriction compte) pour verser ma mélancolie. J'apporterai quelques observations touchant diverses sujets, lesquelles serviront j'espère à quelques autres personnes. (Que ces observations soient critiquées ou approuvées, c'est ce qui résoudra mon irrésolution et mes problèmes)


Cent ans de solitude - Quel problème pose de front ce titre ? La solitude. De la profonde signification de ce mot pour moi, surgissent ces distinctions :


1° Solitude d'idées : ne trouver aucune personne, dans toute la société, semblable en moi sur le plan des idées. Ne trouver rien à partager avec personne. N'aimer rien de ce que les autres aiment, et tout détester de ce qu'ils aiment; préférer bien plutôt, mais n'approuver rien... Etre plus détestable qu'un criminel, parce qu'il est préférable aux yeux de la société, de tuer une idée plutôt qu'un homme.
De ce problème j'ai tiré cette conclusion : que nos idées comptent plus que notre personne... La souffrance d'être différent plutôt que le silence; un chien qui aboie à de faux signaux, sera toujours plus aimé de son maître qu'un chien silencieux


2° Solitude du superlatif : Se sentir supérieur à la majorité des hommes, sentir cela comme plus intrinsèque que tout organe, sentir cela dans toute parcelle de peau, n'en douter jamais, rougir d'en douter, souffrir d'en douter, et puis voir autour de soi les hommes s'éloigner insensiblement, s'unir comme une masse écrasante qui dit : "Tu sais que tu vis de notre reconnaissance, mais c'est au prix de tomber de tes nuages et d'être fait de la même boue que nous que tu la payeras." Car : Il n'y a rien qui éloigne plus les hommes que l'apparence de force, et là où tous les animaux se séduisent par des signes de force, les hommes se séduisent principalement par des signes de faiblesses. Nous sommes pleins de cratères nommés Affection où les autres cherchent à se loger, pour y trouver de la chaleur, un lit de soie et des draps de coton... Mais combien un homme qui ressemble à une lune polie ennuie et désintéresse ! Celui-là est l'orgueilleux, animé d'un saint orgueil - je l'honore.


3° Solitude de l'intempestif : N'être pas de son temps, être comme l'avorton d'un autre temps, parler même une langue morte à des oreilles qui n'aiment plus que la fadeur et les sentiments tièdes, à des oreilles qui ne peuvent comprendre - elles sont d'un siècle qui écrase toute originalité, toute liberté de caractère et d'être (Et on parle de démocratie !) On a inventé mal de siècle pour un siècle qui me charme plus que celui-ci, on y était pas aussi fades, aussi sereins ! Doit-on accepter de se renier pour vivre son temps ?


4° Solitude de l'inactuel : N'être pas de son pays, être né dans un pays : contre mes idées, contre mon temps et contre mes instincts. Regarder vers l'Europe, vers la France, l'aimer profondément plus que tout autre terre, et puis se désespérer, pourquoi aimer des vestiges ? Pourquoi aimer ce qui déjà annonce la mort ? La France est aujourd'hui un pays de fantômes et de souvenirs. Vers quel lieu aller lorsque la terre entière est inhabitable ?


5° Solitude de l'amoureux : Comment je me figure l'amour ? Un homme plein de plaies et de cicatrices, mélancolique sans être pessimiste, tendre sans être plaintif, tout renfermé en ses misères et en ses inquiétudes, un homme dont la démarche même est une contorsion pour dire péniblement encore, oui à la vie... Et puis une femme qui annonce la vitalité et la mobilité des sens, fraîche comme une branche d'amandier, une femme qui aimera cet homme malgré lui, malgré son grand non à l'amour, à la vie, à l'épanouissement, une femme dont les caresses seront pour lui en un mot, son grand oui à la vie, le début d'une réouverture, le début du commencement du bonheur quelque chose d'infinitésimal qui fait éclater de grandes perspectives.
Et comment une telle rencontre peut-elle se faire : Par fatalité. L'amour est une fatalité. Et qu'est-ce qu'une fatalité ? Quelque chose de si complexe qu'on ne peut en découvrir les mécanismes, un mystère nécessaire, une nécessité pour nous du mystère en de telles choses... A jamais les coeurs se tairont sur de telles réponses, et toujours on aimera, parce qu'on ne sait pas, et qu'on est heureux de ne pas savoir... Je ne crois plus en la séduction (car elle explique le désir, pas l'amour)


Voici dans l'ensemble tout ce que j'ai à dire pour l'instant, le reste se dira de lui-même. Ces choses ont été dites dans un style un peu littéraire; elles exigeaient ce style. Elles viennent d'un épanchement de coeur. J'ai écris comme je me parle, j'ai exprimé, comme de vieille coutume, l'intériorité par le style.

Bien à vous,
Helmut.